mercredi 1 juillet 2015

Vie du blog


Ca y est, les copies de Bac sont terminées. Je vais pouvoir me remettre à procrastiner en attendant la Mort.

"Ah, Phersu, tu as toujours ton blog ?"

"Oui. Mais je..."

"Je ne le lis plus depuis que tu ne parles que de jeu de rôle."

"Oui, je sais."

La dépolitisation de ce blog a fait fuir certains de mes amis.

Prenons le vocabulaire de la mythologie freudienne comme les Français le connaissent encore bien. Mon problème actuel est que je suis devenu un "gauchiste complexé", ce qui paraît un oxymore comme on imagine plutôt le gauchisme du côté cathartique de la desinhibition.

Les Réformistes de la gauche libérale (ou prétendue "gauche" en tout cas anti-socialiste comme le dit Michéa) se moquent souvent d'un "Surmoi marxiste" qui pèse sur le vocabulaire et qui conduit à un Molletisme (c'est-à-dire un lexique pseudo-communiste avec une pratique très centriste). Mais dans mon cas, je dois encore apprendre ce lexique nouveau que je croyais réduit auparavant à une Langue de Bois étrangère, et c'est donc au contraire le Centrisme des partis de gouvernement qui était mon Surmoi : Principe de Réalité, Grands Equilibres, Engagements contractuels, blablabla... Je voyais bien que cela vidait la politique de tout contenu mais c'était dans cette mince dépolitisation que je croyais encore pouvoir ironiser facilement.

J'étais auparavant, jusqu'à environ l'élection de Hollande, un réformiste très timoré (en gros, un Rocardien et un Cabri s'illusionnant de manière volontariste sur le fait que l'UE allait être une Ruse de la Raison vers une Puissance Publique sociale-démocrate) mais j'étais finalement assez "certain" dans ma modération. Rocard disait que lorsqu'on est social-démocrate jeune, on le reste, alors qu'un mao ou un trostkiste jeune devient un néo-Conservateur en veillissant (le cas légendaire en France étant Denis Kessler : "Je crois toujours à la Lutte des classes, mais j'ai changé de camp"). Mais à présent, je pense que j'ai toujours eu tort et que si le réformisme modéré doit conduire à cela (à Valls, en gros), ce sont au contraire ceux dont je me moquais auparavant, tous ces gauchistes, qui avaient raison.

C'est assez bizarre de se réveiller en n'ayant plus aucune espèce de respect pour ce prétendu Surmoi d'un "Cercle de la Raison" (expression balladuro-vallsienne du journal Le Monde) pour lequel "il n'y a pas d'alternative" et "l'économie est devenue une science, ce n'est plus une idéologie". Schumpeter définit l'idéologie de manière moins négative que chez Marx comme une économie des prémisses. Mon "idéologie" au sens schumpetérien est qu'il est certain qu'il y a de "l'idéologie" au sens marxiste. Les Modérés ne parviendront jamais à me convaincre par quelque argument théorique ou empirique que ce soit que ce n'est pas le sommet de l'idéologie que de croire que l'économie politique ait échappé à l'idéologie.

Mais en même temps, ma "conversion" douloureuse m'a au contraire retiré l'envie d'évangéliser.

Si je me suis autant trompé dans le passé (ou si à l'inverse, je me trompe autant à présent), je ne me vois pas tellement l'autorisation de livrer des opinions aussi instables et précaires. Je suis à la fois moins "modéré" (car je n'y vois plus d'issue favorable) et encore plus plein de doutes qu'auparavant.

Par exemple, sur la Grèce, je serais partisan qu'on intervienne pour alléger la dette et l'austérité mais je suis conscient qu'on ira en fait vers une sortie de la Grèce qui à court terme en tout cas ne fera que profiter encore plus à une ruine du pays. Mais je ne vois pas d'autre moyen.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Rocardiens en 88 on nous classait au centre gauche, à la droite du PS. Avec les mêmes idées, nous sommes aujourd'hui presque à l'extrême gauche (en tout cas plus à gauche que PS). Mais les gauchistes avaient tort car il ne jouait pas ce jeu dialectique auquel tu penses, et ceux qui ont gagné, les nihilistes de droite encore plus. Le rocardisme nous hantera comme une uchronie mélancolique. Goodtime

Anonyme a dit…

J'avoue faire partie de ceux qui scrollent comme des fous quand il s'agit de JdR. Donc je ne passe plus beaucoup de temps sur ce blog... Mais il y a toujours de temps en temps un post qui redonne de l'espoir (espoir de lire des trucs qui m'intéressent, pas espoir en la politique française, évidemment :D), comme celui-ci.

Continuez ! peut être n'avez vous jamais été meilleur commentateur politique que dans le doute et l'incertitude.

Elias a dit…

"Les Modérés ne parviendront jamais à me convaincre par quelque argument théorique ou empirique que ce soit que ce n'est pas le sommet de l'idéologie que de croire que l'économie politique ait échappé à l'idéologie."
Ah oui ! Et cette dénégation de leur propre positionnement idéologique est peut-être ce qui me les rend le plus odieux ...
d'un autre côté je n'arrive pas à m'enflammer pour Varoufakis ou à partager la Lordonolâtrie des gauchistes

Fr. a dit…

Avoue que le poker BCE/FMI/FR/DE/GR est la plus spectaculaire partie de jeu de rôle jamais jouée…

"– Je laisse passer le délai.
– OK. Tu perds 3 points de santé mentale."

Phersv a dit…

Ah, Varoufakis, le peu que j'en ai lu me semblait assez intéressant.

Mais je suis peut-être seulement victime d'un effet d'Image du Marxiste ayant travaillé sur l'économie virtuelle des MMORPGs.

Lordon, cela dépend. J'admire beaucoup ses livres à cause des références philosophiques (même si, sur le fond, je ne suis pas encore convaincu par le spinozisme) mais le ton militant des articles du Monde Diplomatique tend toujours à ce ton de Guerre ("Mais ce sont eux qui nous font la Guerre, on les tuera tous ! On ne fera pas l'économie de la violence !").

Et je n'étais pas d'accord avec la ligne MondeDiplo/LMSI/Todd sur Charlie Hebdo.

François Brutsch a dit…

Sur la page fantôme Lieu Commun que je maintiens, je filtre: il y a tous tes posts sans les jeux...
http://bit.ly/lieu-commun

Phersv a dit…

Oui, j'avais vu que Lieu Commun était toujours là.
Je me souviens de l'époque de "Publius" (auquel je n'avais pas participé directement, n'ayant pas d'arguments très décisifs sur le TCE).

Le Non du 2005 a eu un bilan ambigu : d'un côté, il n'y eut aucun "Plan B" contrairement à ce qu'espéraient les Nonistes, de l'autre le fait que les autorités n'aient pas vraiment pris compte de ce vote semblait presque le légitimer d'autant plus.