dimanche 29 août 2010

D&Dismes



Je traverse encore une phase où je n'ai guère de plaisir à lire des comics mais où mon attention trop fluctuante (ça doit être de la faute des "psychopouvoirs", dirait Stiegler) se concentre sur les jeux de rôle, et notamment sur les vieux jeux un peu dépassés.



  • Nous avons essayé une micro-partie de Basic D&D (version Moldvay) avec Armide, qui jouait une voleuse humaine dans la cité de Grisfaucon. L'idée était surtout de commencer par un jeu de rôle archaïque afin de pouvoir mieux apprécier les progrès. 4 points de vie au départ (et encore, avec la règle maison qu'on prend le maximum au lieu de tirer 1d4) est vraiment ridiculement petit. Même en étant très prudent et en minimisant les combats avec des PNJ il est trop facile de mourir (la plupart des armes font 1d6, ce qui donne donc 50% de chance de tomber dans le coma dès le premier coup qui touche).

    La version de D&D que je connais n'est décidément pas vraiment jouable avant le 3e Niveau (surtout que le Clerc n'a aucun sort, donc pas de Soin, avant le Niveau 2).

    La 4e édition donne enfin assez de points de vie aux personnages débutants mais cela a eu, paraît-il, le défaut de rendre les combats encore plus interminables à haut niveau.



  • Je disais en commentaire au poste sur OD&D que la qualité principale de l'Old School Renaissance est la personnalisation.

    Par exemple, on peut changer pas mal le jeu sans aucune modification des règles. Le nouveau rétro-clone d'OD&D, Lamentations of the Flame Princess, a ainsi changé subtilement les descriptifs des sortilèges (sans modifier nécessairement l'effet en termes de jeu) pour les rendre un peu plus inquiétants et légèrement lovecraftiens.

    On peut de même facilement garder les mêmes descriptifs mais dire que chaque Mage a en fait une version idiosyncrasique du Sort et qu'il doit lui donner un nom (le nom en termes de jeu n'étant pas le nom à l'intérieur du contexte du jeu). Au lieu d'un terme générique comme Sommeil, chaque joueur peut choisir d'appeler son sort "Soupir Embrumé du Lotus Ecarlate", "Quenouille Venéneuse de Carabosse", "Enchantement scellé de Viviane" ou "Baiser ailé d'Hypnos". C'était une recette d'occultisme déjà indiquée dans Empire of Petal Throne (comme "Halo Argenté du Vol d'Âmes") et c'est une idée à voler. Cela risque de devenir parfois un peu gênant pour le Maître du Donjon s'il doit avoir un tableau de traduction pour chaque Mage mais on doit y gagner en atmosphère occulte. Même les sorts les plus triviaux peuvent aussi varier subtilement : Magic Missile (un projectile d'énergie) pourrait devenir, comme dans le comic Doctor Strange, "Anneaux Rageurs de Raggador", "Flèches des Faltine" ou "Orbes Ombilic des Hordes d'Agamotto", avec des couleurs et des "signatures" différentes (ce qui pourrait même identifier le lanceur dans certains cas).



  • L'idée de Sortilège aux noms fleuris vient d'ailleurs de Jack Vance dans le cycle de Dying Earth. La magie de D&D est très curieuse si on n'a jamais lu ces romans de Vance. Chaque mage doit mémoriser un nombre de sortilège chaque jour, il les "oublie" dès qu'il les lance et il doit le ré-apprendre chaque jour dans son Livre de Sorts (système dit "Fire & Forget" ou "Magie Vancienne"). Le second jeu de rôle Tunnels & Trolls abandonna déjà ce concept en le remplaçant par la simple fatigue physique (on peut lancer le même sort tant qu'on a assez d'énergie - les Mages de T&T se retrouvent donc à entraîner leur Force pour lancer les sorts les plus fatiguants) et c'est ensuite devenu le système de Points de Mana dans la plupart des jeux.

    Jeff Rients en avait tiré une description plus précise : dans ce système, chaque sortilège est une structure pluridimensionnelle incroyablement complexe (et non pas une simple formule Abracadabra ou un mantra). Les sortilèges sont eux-mêmes des sortes d'êtres animés : apprendre un Sort consiste donc presque à posséder une sorte de Démon enclenché dans son esprit.

    On pourrait même donner un % de chance qu'un Sort devienne Intelligent et traiter chaque sort de haut niveau comme une sorte de Démon Familier avec un "Ego".

    Ainsi, le Guerrier ne serait plus le seul à avoir son Epée magique intelligente à qui parler, le Magicien devrait aussi parlementer avec sa Boule de Feu (pardon, ses "Gueules mordorées de la Grande Salamandre de Djin"), qui pourrait même le supplier d'éclater de temps en temps en forêt par simple pyromanie.



  • Ze Bulette de Dungeons & Digressions vient de proposer une conséquence encore plus amusante : et si le Livre de Sort (du moins à partir d'un certain Niveau de sorts) aussi était un être animé et mortel (il y a même une table des effets aléatoires d'un décès de Livre de Sorts).

    Le Mage peut avoir à faire des quêtes pour soigner son Livre, pour le décorer, pour l'enrichir, pour le restaurer ou bien le remplacer.

    On pourrait imaginer que les autorités suprêmes de l'Université de Magie de votre monde peut contenir parmi son Conseil administratif plusieurs Livres intelligents remarquables et même quelques Sortilèges de haut niveau (chaque Sort de Voeu pourrait être un Djinn ou Dieu séparé). Un Bibliothécaire qui est en même temps un Codex Maudit peut être un PNJ intéressant.



  • Dans les idiosyncrasies que j'ai vues rcemment dans l'Old-School, Zak Sabbath (réalisateur des vidéos I Hit It With My Axe) a des Gobelins qui sont devenus incapables de ne pas mentir (ce qui semble réfuter le critère d'universalisation de la maxime chez Kant, car leur société tient avec des menteurs pire qu'Epiménide). Dans sa campagne de Dwimmermount, James Maliszewski a des Nains qui sont tous des créations artificielles (un peuple de Golems & Démiurges prométhéens, tous sont à la fois Dédale et Talos).

    Le vieux cliché des Elfes - Nains tolkieniens est une plaie de la fantasy. Au lieu de l'opposition Végétal-Minéral, Vitalisme-Mécanisme ou Nature-Artifice, j'avais pensé jouer avec une simple opposition de classes sociales à la Morlock-Eloi (les Nains sont le prolétariat productif, les Elfes l'aristocratie oisive) ou en l'inversant (les Elfes sont la féodalité dépassée, les Nains les banquiers et ingénieurs capitalistes). Mais j'aime bien aussi cette solution si simple : le dimorphisme sexuel (les Nains sont tous mâles et les Elfes toutes des femelles - mais en ce cas, comment les distinguer de fées & dryades ? et la gynarchie des Veuves Noires Drows ne devient plus qu'un cas particulier).
  • 2 commentaires:

    Arasmo a dit…

    Personnellement, j'aime bien la magie "vancienne" pour peu qu'elle soit justifiée par des explications du type de celles que tu viens d'avancer. Ce concept de sorts doués de personnalité et rechignant à se faire dompter une fois pour toute par un apprenti magicien offre de très grandes possibilités de scénarios !

    Phersv a dit…

    Il y a aussi la version d'Earthdawn qui justifie bien les idées d'un nombre de sorts limités par jour : un sort est en fait une sorte de "structure" qu'on a dû nouer dans le Plan astral et on doit donc redisposer ces structures chaque matin pour pouvoir lancer le sortilège. Ce n'est qu'un détail d'atmosphère mais qui suffit à faire accepter cette idée du sort qui s'efface quotidiennement.