lundi 3 mars 2008

New Gods of Mankind




New Gods of Mankind est un nouveau jeu de rôle (par Richard Leon chez Dark Skull Studios qui propose de jouer des Dieux.

Le marché du jeu de rôle a déjà au moins quatre jeux de ce type à ma connaissance : 1) D&D Immortals (1985 par Frank Mentzer, qui permettait de continuer à jouer des personnages de D&D après leur apothéose au 36e niveau, où ils redevenaient des dieux de bas niveau par rapport aux autres dieux), 2) The Primal Order (un jeu disparu de chez Wizards of the Coast qui prenait un peu la suite de D&D en 1992), 3) Nobilis (de Rebecca Borgstrom, 1999, où on joue des humains de notre époque qui deviennent les incarnations d'un principe ou d'un concept, un peu comme Morpheus dans Sandman) et enfin 4) Scion (le nouveau jeu de White Wolf où on joue un humain contemporain qui découvre qu'il est le rejeton d'un dieu de la mythologie et qu'il peut progresser jusqu'à émuler son géniteur). On pourrait ajouter la plupart des jeux de superhéros qui permettent de jouer des versions dégradées de certaines divinités (par exemple Champions Gestalt). Je ne compterai pas en revanche Pantheon de Robin Laws, qui n'était pas un vrai jeu de rôle mais plutôt un projet (assez peu jouable) d'une conversation libre sans système (mais qui avait l'avantage de comprendre la création de l'univers).

NGoM ressemblerait plus dans son thème à D&D Immortals. Le livre du joueur, "New God's Handbook", contient en 160 pages un univers original d'heroic fantasy avec quatre races inhumaines et les joueurs doivent interpréter les dieux d'une petite tribu humaine qui émerge face aux races anciennes. Les personnages ne peuvent donc pas avoir créé le monde et il est déjà plus ancien qu'eux, ce qui peut être un défaut, mais permet de limiter un peu la puissance des PJ (même s'il me paraît possible d'utiliser les règles sans cet univers préétabli).

Le meneur de jeu s'appelle le Destin et il incarne aussi cette force qui est au-dessus des Dieux et qu'ils peuvent rencontrer comme l'arbitre de leurs différends (le Destin a d'ailleurs des agents, les Grapplers, des pieuvres multidimensionnelles qui sont chargées de capturer les âmes qui lui échappent).

  • L'univers dans le New God's Handbook

    Après un glossaire des concepts principaux, le livre commence par une assez longue (34 pages) description du monde mortel et matériel, faite par un Gnome passé du côté des Salamandres. En effet, l'auteur a abandonné le cliché des races tolkienniques (Elfes, Nains, Orcs) pour quatre races élémentaires de Paracelse (Sylphes d'Air, Gnomes de Terre, Ondines d'Eau et Salamandres de Feu). Ils ne sont pas littéralement faits de leur élément (comme les Elémentaires de Runequest) mais sont des races mortelles liées - par exemple les Sylphes sont des sortes d'hommes-chauves-souris comme des Harpies, les Gnomes sont des humanoïdes rocailleux comme des Nains ou les Obsidimen d'Earthdawn.

    Ces Quatre races ont déjà leurs dieux (mieux évoqués à la fin du livre, au chapitre 8). Les Ondines ont deux dieux opposés : Celundynn maîtresse de la vie et Plthunlos dieu violent des profondeurs. Les Sylphes adorent Lugos, dieu des airs. Les Salamandres sont les plus divisés, avec neuf Maisons adorant neuf Dragons différents. Les Gnomes ont un panthéon plus hiérarchique avec Gnorr, dieu de la pierre, et divers autres dieux liés à des minerais différents (il y a aussi une race végétale de Dryades). Quelques autres dieux sont mentionnés comme Morgis, un dieu humain du soleil et de la guerre qui règne sur une puissante cité au sud. Certains humains adorent d'ailleurs les dieux anciens ou sont influencés par des Etats des races anciennes.

    Le monde m'a laissé un peu froid. Il évite à peu près le manichéisme - même les Salamandres n'ont pas l'air d'être nécessairement les Méchants - mais il ne semble pas encore avoir une histoire ou une mythologie qui soutiendrait le fait qu'on n'ait pas à la créer nous-mêmes. Le décor est laissé intentionnellement un peu vide pour qu'on crée nos propres tribus humaines et leurs Panthéons dans ce cadre.

    Le chapitre suivant décrit les Mondes célestes et m'a plus inspiré. On sent un peu l'influence des cosmogonies D&D, ou bien l'influence poétique de Nobilis, mais ici les mondes sont ordonnés en quatre Saisons (au lieu de neuf alignements de D&D), ou bien avec des associations d'émotions et de péchés. Les dieux créeront chacun leur domaine dans un de ces mondes célestes, sachant qu'il y est éternel et qu'il ne peut y être vaincu - le seul moyen de détruire un dieu est de tuer son dernier adorateur dans le monde mortel. Il est sous-entendu que les dieux joués sont au début des esprits mineurs qui ont échappé au sort commun des esprits, ce sont donc d'anciens mortels ayant connu une apothéose et non de purs dieux.

  • Les règles

    On arrive enfin au système, fait pour représenter aussi bien les actions des dieux que celles d'armées de mortels. Les mortels ont trois caractéristiques Corps, Intelligence (Mind) et Âme (Spirit). Les caractéristiques sont notées comme des dés polyhédriques. Un humain normal a "d6" dans les trois caractéristiques mais un héros peut avoir "d8", voire "d10" ou "d12". Il suffit de lancer le dé et le plus haut résultat l'emporte. Le dieu commence avec 100 fidèles, dont 30% d'élite (d8 dans une des trois caractéristiques).

    Le nerf de la guerre pour faire des miracles est la Croyance. Chaque année, le dieu reçoit des nombres de points de croyances selon le nombre de croyants encore fidèles, et il peut les dépenser pour faire des miracles, renforcer des Héros ou créer des Reliques. Une table d'événements aléatoires peut faire varier le nombre des fidèles.

    Un des mécanismes intéressants est celui de la Terreur. Si le le dieu se sert de ses pouvoirs pour frapper directement ses fidèles ou ceux d'un autre Dieu, pour envoyer des fléaux ou des châtiments, il accumule des points de Terreur, dont il est difficile de se débarrasser et qui ont un effet addictif (les cibles ont besoin d'une attaque supérieure pour avoir encore peur). Si ses points de Terreur atteignent la moitié de ses points de Croyance, le personnage cesse d'être un dieu et devient une créature démoniaque plus inspiré par la Terreur que par autre chose, ce qu'on appelle un Léviathan. Les dieux ne luttent pas seulement entre eux mais surtout contre ceux des leurs qui sont tombés dans le Côté Obscurs et sont devenus des Léviathans (il y a un Léviathan de la Peste Gorlos de Kandalor qui est en train de se forger un empire).

  • Une épreuve

    Essayons de créer un personnage en suivant la méthode aléatoire.

    Voici Zoimor le Profond, dieu des Ténèbres et des Passions. Il est représenté comme une grande cape voilant tout, avec des yeux enflammés. Il est adoré dans les marais nordiques d'Atanastan. Son domaine secret est dans la Sphère céleste de l'Eternel Hiver et il y a une caverne labyrinthique et profonde. Ses inclinations de Miracles sont plutôt le Contrôle et il est en opposition avec la Création. Ses 30% fidèles d'élite sont peu intellectuels : 10% Physiques, 5% Intellectuels, 15% Spirituels. Ses commandements sont de pratiquer des Mystères dans l'obscurité totale, et que Rien de grand ne se fait sans passion.

    Je commence avec 50 points de croyance et 100 croyance.

    Année 1 : 08 sur la table 5-8 d'événements. Woo-woo. 30 personnes se convertissent à ma foi de mystères orgiaques (on les comprend). J'essaye un petit Miracle en rendant mes prêtres et prêtresses (j'en ai déjà 15 qui ont d8 en Âme) plus attirants et pleins de passions. Je les enchante avec un Miracle mineur (qui les fait passer à d10), pour une semaine dans un village non-contrôlé par un autre dieu (c'est mon Domaine secondaire et c'est l'inclination avec laquelle je suis en harmonie) : cela coûte donc seulement 6 points de croyance. Pour simplifier, on peut dire que cela convertit 15 personnes, ce qui fait finir avec 145 fidèles (soit 29 points de croyance en plus). Je finis donc avec 73 points de croyance.

  • Le jugement

    Je crains que le jeu implique un peu trop de livre de comptes à mon goût, et qu'il se prête donc plus au jeu de société ou sur ordinateur. J'ai aussi du mal à comprendre l'évaluation des Miracles et de leurs effets mais cela viendrait peut-être en étudiant le sixième chapitre sur le "jeu de société". Le livre comprend un petit panthéon déjà prêt de personnages-dieux pré-générés.

    Ils ont déjà sorti plusieurs suppléments : un Fate's Guidebook, un écran et un guide intitulé The Celestial Gardens qui détaille en 143 pages les dimensions du jeu. C'est un travail très professionnel, avec une bonne présentation, impressionnant pour une si petite compagnie, mais j'aurais encore envie d'un système qui évite plus la tenue de registres précis des fidèles chaque année et où on ne semble pas aussi préoccupés par les minuties de l'expansion démographique.

    Un des clichés des mondes fantastiques est que la puissance des Dieux soit proportionnelle au nombre d'adorateurs, qui servent ici de points d'expérience. Or le nombre d'adorateur me semble plus lié à l'accessibilité ou au degré d'interventions qu'à la puissance intrinsèque. On préfère adorer un demi-dieu très "actif" à un Titan omnipotent mais oisif (c'est pourquoi Ganesh est infiniment plus populaire que Brahma ou que les Saints intercesseurs sont plus adorés que l'abstrait Esprit Saint).

    Un système qui pourrait à la fois évaluer plus précisément les pouvoirs et moins tenir compte du nombre précis d'adorateurs pourrait être logarithmique, comme le vieux système M.E.G.S.

    Autres reviews : ce thread sur RPG.net, et ce blog finlandais, plus au courant des développements des jeux indie que moi et qui a donc autant de mal quant à l'aspect "gamist" (ludiste) traditionnel (par opposition à l'axe narrativiste à la mode en ce moment).

  • Aucun commentaire: